CRÉATION LITTÉRAIRE

 

82 JOURS A L’ARMURIER
Création littéraire d’Arthur Dreyfus en téléchargement ici

 


PROPOS DE L’AUTEUR

Les mots. Pour l’écrivain comme pour l’homme politique, rien ne compte plus qu’eux. C’est inévitablement le langage qui détermine la pensée, le droit, la liberté ; et même la réalité. Je crois être devenu écrivain pour comprendre comment des policiers français avaient pu incarcérer mon grand-père, sous prétexte qu’il portait un nom juif. Pour comprendre le sens profond des mots : police, juif, français, nazi – jusqu’à leur mélange explosif.

Plus qu’un décor, ma création littéraire a donc pour point de départ le langage. Elle s’immisce dans les pensées de Léon Blum, ancien Ministre et Président du Conseil, contraint de se dissimuler, pour ne pas être écroué par les soldats de son propre pays, au motif qu’il provient d’une famille juive et a mené une politique dite « socialiste ». Face aux compromissions, aux trahisons de ses amis, déchu du pouvoir qui était le sien, j’ai essayé de me figurer la tempête qui pouvait sommeiller dans cet esprit-là. Afin que le monologue intérieur de cet homme de lettres retranscrive, aux yeux du lecteur, le chaos moral qui dominait alors la France – mais s’apparente aussi à une réflexion plus large sur la fragilité de nos démocraties. Sans prétendre me substituer à la vérité historique, mais en assumant le dispositif de la fiction, j’ai mêlé de véritables déclarations ou pensées de Blum à ma propre plume ; que j’espère la plus authentique possible, sur le plan historique autant qu’émotionnel.

Pour finir, j’aime faire confiance aux hasards. Blum entre en politique avec l’affaire Dreyfus – ce nom qui me colle à la peau comme un brassard. Ensuite, il y a le rêve manqué de la zone « libre ». Grâce à son ami Eugène Montel, Blum trouve refuge dans le château de l’Armurier à Colomiers, sur les hauteurs des Ramassiers. Au même moment, grâce à son ami Jacques André, mon grand-père trouve refuge dans un grenier à Toulouse, afin de poursuivre ses études de chimie, avant d’entrer en résistance dans les Pyrénées. Blum ainsi que mon aïeul seront déportés, et survivront à cette épreuve. André Gide est l’écrivain qui m’a le plus influencé dans ma jeunesse : ce fut le camarade de Blum au lycée. Le premier texte du critique Blum concernait Goethe. L’épigraphe de La Synthèse du Camphre, mon premier roman, qui raconte l’histoire de mon grand-père, était une phrase de Goethe : « Les mots et les choses se cherchent en vain, éternellement. » Chaque jour témoigne encore de cet adage.

Mais les mots sont plus durables que les choses. Lorsque les choses ont été chassées de leurs refuges, ce sont des mots qui les remplacent. Des mots qui écrivent l’Histoire, avec ses failles et ses survivances. Et qui autorisent l’espoir – si on ne les oublie pas.

Arthur Dreyfus

 


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